« Elle est gentille. » « Elle est vicieuse. » « Elle est sournoise. » « Elle sait ce qu'elle veut. » « Elle est courageuse. » « Elle est attirée par l'or. » « C'est une aventurière, une vraie. » « C'est une vraie lady. » Au milieu de tous ces témoignages, difficile de démêler le vrai du faux et de savoir qui est vraiment Itxaso. Les gens s'accordent pour dire qu'elle est une femme de caractère, qui sait ce qu'elle veut et qui a toujours conscience des moyens pour y parvenir. Après... Les avis divergent. Certains la trouvent belle, gentille, charmante, tandis que d'autres sont persuadés qu'elle n'est que manipulation et trahison. Aucun ne sont loin de la vérité, sans toutefois l'atteindre. Certes, Itxaso a conscience de ses charmes et sait les employer utilement, mais bien des hommes et des femmes le font. Oui, elle manie l'art de la manipulation en l'alliant au charme et à la ruse. Mais non, tout cela ne la résume pas.

Non, ce qui pourrait réellement la définir, ce sont ses deux dés à six faces et son éternel calepin rongé par l'eau salée et les embruns. Sa vie, elle la joue aux dés, elle ne se fie qu'au hasard pour avancer. Si les dés lui ordonnent d'aller à droite, alors elle ira, dusse-t-elle se jeter dans la gueule du loup pour y obéir. Le calepin regroupe ses objectifs à atteindre dans la semaine, la journée et parfois même dans l'heure. Du plus banal au plus original, elle les coche tous sans exception. Ce sont ces trois petits objets qui résument l'intégralité de sa vie quotidienne, de son être. Le calepin demande, les dés montrent, Itxaso suit. « Elle a perdu un vulgaire dé aux jeux une fois. Je n'avais jamais vu personne déployer autant d'énergie pour récupérer une vieillerie. » « Elle n'est pas vraiment méchante, Itxaso. C'est juste qu'elle n'est pas vraiment gentille non plus. »

Il était une fois... Une plage.
Ils sont deux, tranquillement posés dans le sable à quelques centimètres de son visage. Se redressant péniblement sur un coude, une demoiselle les observe en plissant les yeux. Cubiques, blancs avec de vulgaires points noirs, ils portent des écritures sur l'une des six faces qu'elle ne parvient pas à lire. Une image d'ascenseur lui trotte dans l'esprit quand elle s'empare des deux petits dés luisant paisiblement au soleil. Mis à part cette curieuse histoire bien floue, rien d'autre ne lui traverse la tête. Assise sur une plage, l'esprit vierge, elle contemple les vagues qui s'écrasent devant elle en caressant les dés. Voilà. Elle est là. Et maintenant ?
Sans trop y penser, la demoiselle regarde les dés rouler avec difficulté sur le sable humide. Entre un et six, je pars à droite. Entre sept et douze, à gauche. Cinq. Elle part à droite.

La suite n'est qu'une vaste plaisanterie, une suite parfaitement aléatoire d'événements. En partant à droite, elle termina devant une vulgaire maison posée là, sans grande raison d'être. On lui donna à manger, on lui offrit un carnet. « Note tout ce dont tu te souviendras, ma petite, ça t'aidera peut-être à trouver ta voie. » Ascenseur. Itxaso Sofia Etxegoyen. Ce n'était pas grand chose pour trouver sa voie, mais c'était déjà bien suffisant pour trouver quoi faire et pour se présenter.

Itxaso, puisque tel semblait être son nom, traça rapidement ses premiers mots dans le petit calepin : trouver quoi faire. Les dés se chargèrent du reste, l’entraînant toujours plus loin sur les côtes, lui ordonnant des choses toujours plus improbables. Comment elle obtint ce petit trésor ? Aucune idée, mais il lui permit d'embarquer finalement sur le Jolly Roger. Devenir pirate n'était pas une vocation qu'elle avait imaginé mais elle lui allait pourtant comme un gant et elle échangea son trésor contre une place dans l'équipage. Elle n'était là que depuis un mois, mais il semblait bien qu'elle ait fini par trouver sa voie finalement.